Patron numérique

Au-delà de la vitesse de transmission des données c’est la rapidité d’évolution du produit et sa prégnance sur la vie socio-économique qui frappent les imaginations. Le « gadget » initialement réservé à la communauté scientifique et militaire met désormais en réseau environ deux milliards et demi d’internautes. Un chiffre qui a doublé en cinq ans. Et qui en amène d’autres : le site de partage de vidéos YouTube draine chaque mois 800 millions de visiteurs, l’humanité envoie chaque jour 294 milliards d’emails tandis qu’on compte actuellement environ 300 millions de sites web dans le monde…

Tous ces chiffres hallucinants alors qu’à la chute du Mur de Berlin en 1989 personne ou presque sur la planète terre n’avait entendu parlé de ce réseau ! Pas plus d’ailleurs que d’un smartphone, de Facebook ou d’e-commerce. C’est tout juste si les « mobilophones » faisaient leur apparition dans la voiture de quelques médecins, ministres ou chefs d’entreprise. Moins de 25 ans plus tard, Internet, qu’on le veuille ou non, domine de part en part la vie économique. Explications.

Fils d’Arpanet

Lubie de scientifiques, outil militaire ou simple calcul de pragmatiques ? Au-delà d’une certitude géographique – ce sont les Américains qui l’ont inventé – les avis divergent sur l’origine d’Internet. Dans un pays où défense et recherche sont étroitement liées, la réponse tient vraisemblablement dans un condensé des trois hypothèses. Internet n’est en réalité que le fils naturel de son ancêtre « Arpanet » né dans les années 60 en pleine guerre froide. Les historiens nous enseignent que le but originel de ce réseau de communication entre ordinateurs était de préserver la circulation des informations militaires en cas d’attaque massive de l’Union soviétique. Officiellement, il fallait « garder ouvertes des voies de communication quel que soit l’état de destruction du pays ».

Pour mettre au point le système, le département de la Défense des USA confie ce projet à la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency) mais les chercheurs, financés par cette agence (aussi appelée Arpa quand le D de défense est trop encombrant) n’ont pas que des objectifs militaires. Comme ils sont disséminés aux quatre coins du pays, ils cherchent le moyen de raccorder à distance des ordinateurs fabriqués par des constructeurs différents. La première toile Arpanet montre clairement des nœuds de communication et des lignes reliant les principales villes du pays. Lorsqu’un des centres (nœuds) est hors-service, les données peuvent alors emprunter d’autres chemins et d’autres nœuds pour atteindre leur destination initiale.

Ainsi, « l’Internet » du début des années 70 relie ensemble une grosse vingtaine de centres de recherche. Bientôt, ils seront 100, puis 200, puis 2000, avant que le réseau ne traverse l’Atlantique… L’outil reste cependant confiné aux usages militaires et scientifiques pendant une quinzaine d’années.

Derrière ce premier succès, subsiste cependant un véritable problème : ils ont beau être menés par des scientifiques, les ordinateurs ne se comprennent pas toujours entre eux : ils ne parlent pas le même langage ce qui pose d’insurmontables problèmes quand il s’agit de faire circuler l’information. L’adoption, le 1er janvier 1983, du protocole TCP/IP sera « la » solution. Derrière ce nom barbare se cache le système mis au point des années auparavant par Vint Cerf et Robert Kahn, c’est la base de l’Internet moderne.

Une source inépuisable ?

Les chercheurs ayant résolu leur principal problème – les ordinateurs parlent désormais la même langue technique – ils vont pouvoir révolutionner le transfert de données en ligne et permettre au réseau Internet de se développer à une vitesse exponentielle.

À tel point que la source d’adresses IP (celle qui permet d’identifier un ordinateur quelle que soit sa position dans le monde), considérée comme inépuisable il n’y a pas si longtemps, s’est tarie. On a donc dû lancer une nouvelle version (l’Ipv6), elle aussi est considérée, à ce jour, comme inépuisable…

À tel point que le haut débit (pour véhiculer les infos aux quatre coins du monde à la vitesse de l’éclair) vise toujours plus haut. Et que l’Internet mobile (sur smartphones et autres tablettes) a de moins en moins à envier au fixe.

À tel point que l’avènement d’Internet a considérablement influencé notre manière d’évoluer dans notre sphère privée et professionnelle. Il a modifié nos manières de vivre, de nous déplacer, de travailler, de consommer… Il pèse de tout son poids sur l’économie mondiale, depuis ces robots spéculateurs capables de générer des opérations boursières pour des milliards d’euros en quelques millièmes de secondes jusqu’à la réservation d’une table bien précise dans un restaurant de quartier. Et ce n’est sans doute qu’un début.

En marche ou à la marge ?

Que doit faire le patron de PME dans ce contexte ? Prendre le train en marche ou rester à la marge ? Les plus avisés ont compris depuis longtemps que le salut réside dans la première hypothèse. Il n’y a pas si longtemps, développer un site web d’entreprise était salué comme une entrée dans la modernité, une œuvre de pionnier en quelque sorte. Aujourd’hui, le site web est devenu le minimum minimorum pour exister. Car il ne s’agit plus seulement d’être présent sur la toile, il s’agit d’exister tout court dans un monde où l’Internet est devenu le principal média de communication. Le site dédicacé n’est plus le seul outil de communication en ligne. Il doit être administré en lien avec Facebook, Twitter ou quelques-uns des nouveaux outils disponibles chaque année.

Désormais, la vie d’une entreprise sur le web passe par les médias sociaux, l’intelligence stratégique, le soin apporté à l’image, l’e-commerce, l’e-mailing, l’e-réputation, l’e-mobilité…

Bref, le web n’est plus seulement une vitrine, c’est un outil de travail. Donc de croissance.